jeudi 29 janvier 2009

Souvenirs d'antan

Je savais porter mes chaînes, relié à jamais à une réalité dont je m'éloignais sans cesse un peu plus. Et je restais, âme parmi les ombres, sombre peine dans un océan en perdition. Ressentir l'envie des passions interdites et ne savoir où aller. Je me voyais déchiré, écartelé, dans les bras des amoures perfides et dénaturées. je n'étais déjà plus moi-même, mais ce que j'avais pu être revenait en force et s'écrasait en mon fort intérieur avec une violence extrême.
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Assis dans la méridienne pourpre qui faisait face à la grande baie donnant sur la falaise, les yeux clos et mouillés des larmes amères de l'espoir perdu, j'écoutais le ressac s'amplifier en grondant dans la colère sourde de l'océan. Je sentais l'effroi des oiseaux marins qui évitaient les écueils sanglants et les remontées mortelles en planant tel des dieux sur les hauteurs abyssinales des anciens cieux éteints.
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Je revoyais avec discernement et des plaies à l'âme les yeux clairs et doux encadrés de cheveux longs aux accents automnaux des bises froides et des feuilles mordorées arrachées aux branches frêles. J'avais le coeur malade et la passion débordante. J'aurais pu hurler cette vérité affreuse qui me revenait sans cesse en mémoire comme autant d'abandon autour de lacs gelés.
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La rumeur incessante des vagues gonflait sous les fenêtres tristes de ma demeure ancestrale. Cela me mettait d'autant plus d'humeur triste et sombre. En ces moments, la vie elle-même semble bien futile et illusoire, fruit des insistances puériles d'une nature exigeante et égoïste. Une vie faite de tristesse, de malheur, de coups du sort, d'antagonisme et d'horreur.
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J'avais mené ma vie comme dans l'espoir d'un vieux rêve déchu et j'avais été le pire témoin des agissements méphitiques de ma propre personnalité ... la peur et l'envie ... mais surtout cette curieuse passion pour ce que je ne pouvais posséder. J'avais été le seul jouet de mes propres terreurs, de mes vieux démons ... des démons qui avaient eu la vie dure !
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J'étais assis dans la méridienne face à l'étendue marine et j'attendais. J'attendais que la plainte cesse. Je fixai longtemps le gramophone avant de songer à le mettre en route. Les vieilles musiques me sont toujours source de plaisir. J'ai attendu ... j'ai attendu jusqu'à ce que le rouleau ait fini son vieil air et ensuite ... le vide sous mes pieds et la falaise en contre-bas ... rien de plus, rien !
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Un écrit de DorianGray